Chapitre 13 : Les journées passent... Ce matin là, j’eus le plaisir de constater que mon ami Assorien était venu me chercher. J'avais effectivement dormi tard, aussi les parents de ma correspondante étaient déjà partis à l’arrivée de Rsim-Agrop. Ce dernier m’embarqua à son bord sans même me laisser petit déjeuner ou placer un mot. Il me fit visiter entièrement sa maison dont j’avais déjà aperçu deux pièces lors de mon premier passage. J’admirai son lit volant qui berçait son dormeur et qui jouait de la musique. Je pus constater la différence avec la maison des parents d’Animia : les meubles étaient plus bas et plus massifs. Il était évident que mon ami l’Assorien était d’une toute autre envergure que les Zywakiens. Sa maison avait la forme d'une pyramide. Il m’obligea à goûter une spécialité Assorienne : la chose pâteuse qu’il avait posé devant moi, avait une saveur surprenante et j’en repris plusieurs fois.
– Je suis étonné ! s’exclama-t-il.
– Je suppose que je dois être le seul Mungien a aimer cela.
– Oui, j’en avais donné à des passagers Mungiens et ils avaient tous sans exception détesté ça.
– Pourquoi m’en as-tu proposé alors ?
– Parce que je n’ai pas autre chose chez-moi !
– Si j’aime cela, je pense que mes origines Lombr... tu sais quoi ! plaisantai-je.
Il partit d’un grand éclat de rire et dit :
– Il faudrait que tous les Mungiens aient un parent Lombrien !
– D’en ce cas là les Mungiens n’existeraient plus, ils finiraient par devenir tous des Lombrungiens.
Il me désigna une autre pile de journaux ordinateurs.
– Deuxième pillage chez le vendeur ! annonça-t-il.
Je vis des photos de la conférence et crus deviner que pas mal de mes paroles avaient été déformées, mais je ne pus en être certain vu qu’il n’y avait pas de traduction en Terrien ! Je dénichai aussi le journal qui avait publié la photo où je tenais la main d’Animia ainsi que celui où les parents de ma correspondante annonçaient publiquement nos fiançailles ( Rsim-Agrop me l’avait lu.)
La matinée passa très vite et c’est avec regret que Rsim-Agrop me ramena à la maison où je séjournais. Animia m’accueillit avec un tablier.
– J’essayais de préparer un repas Terrien pour le déjeuner, m’expliqua-t-elle.
– C’est quoi ? questionnai-je, amusé.
– Frites et bifteck ! Et ne ris pas s’il te plaît, j’ai eu beaucoup de mal à obtenir la viande et les pommes de terres Terriennes, j’ai été obligée d’envoyer R.Obbots sur Terre. Et c’est pour te faire plaisir que je l’ai fait ! Je sais qu’il est déjà 14 heures passées, mais ce n’est pas grave, nous mangerons tard, c’est tout.
– Puis-je t’aider ?
– Si tu veux, comme ça tu verras la pièce où l’on prépare les repas.
C’était une grande pièce blanche, recouverte de touches chiffrées. Animia appuya sur 1 et une table apparut, sur 2 les fourneaux, sur 3 les plats, sur 4 les ingrédients, sur 5 les livres de cuisines, sur 6 la poubelle, sur 7 les ustensiles.
– Est-ce que l’on trouve une machine à fabriquer les frites ici ?
– Non Marc, cela n’existe pas sur Zywak !
– Et le couteau pour éplucher et couper ça existe ?
– C’est inutile.
Elle pressa une touche et je vis un grand cube bleu apparaître, Animia mit les patates dedans, j’entendis un bruit de moteur et les pommes de terres épluchées apparurent sur la table.
– Comment les patates se sont-elles retrouvées sur la table ? demandai-je, ébahi.
– C’est de la téléportation. Personne n’a encore découvert le moyen de téléporter un être vivant ou une chose sur une longue distance et on ne peut téléporter que sur environ cinq mètres, ce qui n’est guère intéressant, mais a quand même son utilité.
–Ah ! Et maintenant, il faut couper les pommes de terres en fins rectangles.
– Je suis désolée, mais je n’ai pas de machines pour cela !
– Revenons aux bonnes vieilles méthodes ! Le couteau est un ustensile utile en fin de compte, n’est-ce pas Animia ?
–Je retire le mot inutile, prends un couteau !
Nous coupâmes, fort mal, il faut le reconnaître, les patates et à la fin nous obtînmes des frites plutôt bizarres. La cuisson de la viande fut plus rapide et ne nous posa aucun problème.
Enfin nous pûmes manger un repas Terrien : les frites étaient presque carbonisées et la viande n’était pas assez cuite ! Mais nous appréciâmes quand même le repas car nous nous étions amusés comme des fous à le préparer.
– Alors Marc, que dis-tu de mes talents de cuisinière ?
– Euh... La prochaine fois, cuisine plutôt un plat Zywakien.
– Toi aussi tu fais un piètre cuisinier, tu aurais dû me donner des conseils plus judicieux, après tout c’était un plat typiquement Terrien !
– Je n’ai pas l’habitude de faire des frites et mon bifteck était très bon ! Je l’aime saignant.
– Tu aurais pu penser à moi !
– Désolé, dans tous les cas on s’est bien amusé, hein ?
– C’est bien vrai ! Que le temps passe vite !
– Pourquoi dis-tu ça ?
–Ton séjour va bientôt s'achever !
– Ouais ! Mais je ne serais pas fâché de retrouver la routine de ma planète.
Nous étions tranquillement en train de bavarder quand nous entendîmes un bruit, c’était les parents d’Animia. Ma corres-pondante les regarda droit dans les yeux, puis leur tourna le dos et prit l’ascenseur. Je fis un geste pour me lever et la retenir, mais le père m’arrêta :
– Laissez cette enfant gâtée !
J’eus envie de protester, après tout j’avais le même âge qu’elle, seulement sur Zywak, c’était une autre affaire, j’étais considéré comme un Mungien adulte. Combien de fois devrais-je me le répéter ? Je ne pouvais en vouloir aux parents d’Animia de suivre ce qu’on leur avait enseigné dans leurs jeunes années, cependant cela ne m’empêchait pas de me sentir coupable vis à vis d’Animia. Je n’étais pas sympa, j’aurais dû être solidaire avec les gens de mon âge, mais d’un autre côté je devais m’avouer que je ressentais une certaine fierté à ce que l’on me considère comme un adulte.
– Alors Grimfilk, c’est d’accord ?
D’accord pour quoi ? Mince ! Tandis que j’étais en train de m’interroger, le père d’Animia avait entamé un discours dont je n’avais pas entendu un seul mot !
– Vous paraissez bien pensif, déclara la mère d’Animia.
– Je dois vous avouer que j’étais... ailleurs quand vous avez parlé tout à l’heure, excusez-moi vraiment, mais pourriez-vous répéter ?
– Bon, je recommence, mais soyez attentif ! s’exclama le père.
J’étais ébahi, il n’était pas en colère ! Miracle !
– Voilà, au lieu de simplement nous accom-pagner à notre travail, je vous propose de relever un défi...
– ...UN DEFI ? Quoi comme défi ?
– Vous m’auriez laissé terminer, je vous aurais expliqué... enfin... le défi consiste à vendre 112 tapis identiques en 24 heures et pas questions de baisser leur prix.
– Que se passe-t-il si je perds ?
– Vous n’obtiendrez pas le diplôme de vendeur.
– Mais, s’il s’agit d’obtenir un diplôme, pourquoi parlez-vous de défi ?
– Ça, c’est mon problème, alors, acceptez-vous ?
– Si je dis non, que se passe-t-il ? demandai-je, car je savais que les parents d’Animia ne me proposaient pas ça pour rien.
– Plus de correspondance avec Animia après rupture des fiançailles !
– Mais c’est une sorte de chantage ! protestai-je.
Cela ne me dérangeait pas qu’ils rompent les fiançailles, mais ne plus correspondre avec Animia, c'était impensable !
– C’est peut-être bien un chantage, mais ce n’était pas prévu que vous fassiez tant de manières, je vous croyais plus courageux...
Cela piqua mon orgueil.
–Il faut être prudent avant de s’engager mais j’accepte, je relève le défi ! m’exclamai-je.
Au moment où je prononçai ses mots, je compris que j’avais foncé tête baissée dans le piège que le père m’avait tendu, mais trop tard, je m’étais engagé !
–Bien ! Demain je vous conduirai à la bou-tique, soyez prêt à 6 heures et demie. Maintenant que tout est réglé, dînons, dit le père.
– Je n’ai pas faim, Animia et moi avons déjeuné tard et puis de toute façon, il faut que je me couche tôt pour être en pleine forme demain.
– Bonsoir ! s’exclamèrent les parents d’Animia d’une seule voix.
(Fin du Chapitre 13)